L’éditeur d’une application mobile condamné pour concurrence déloyale
(Jugement rendu par le Tribunal de Grande Instance de Paris le 30 juin 2017).
Faits et procédure
La société Appimédia, ayant pour activité l’édition de jeux accessibles sur internet, et notamment des services de poker en ligne par le biais de son application phare AppCash, a vu d’un mauvais œil l’arrivée d’un concurrent en ce domaine. En effet, l’éditeur Prizer, à l’origine de l’application Prizer sur mobile, propose un service de jeu gratuit similaire. Les deux applications ont vocation à organiser des tirages au sort selon des fréquences déterminées (quotidienne, hebdomadaire, mensuelle, spéciale) au bénéfice d’internautes, sous réserve d’avoir préalablement visionné l’intégralité d’une vidéo publicitaire, et de leur permettre de gagner des sommes d’argent.
Se sentant lésée, la société Appimédia a, dans un premier temps, mis en demeure le concurrent, l’invitant à cesser toute exploitation et promotion de l’application, alléguant une atteinte à ses droits de propriété intellectuelle, puisque « Toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite sans le consentement de l’auteur (…) est illicite » (article L122-4 Code de la propriété intellectuelle).
N’ayant pu s’entendre, les deux sociétés ont dû en débattre devant la justice. Ainsi, par assignation des 14 et 18 août 2014 Appimédia a attrait Prizer en contrefaçon de droit d’auteur, et à titre principal et subsidiaire en concurrence déloyale et parasitisme devant la 3e chambre du TGI de Paris.
Une décision qui rejette le fondement de contrefaçon de droit d’auteur…
Si « l’auteur d’une œuvre de l’esprit jouit sur cette œuvre, du seul fait de sa création, d’un droit de propriété incorporelle exclusif et opposable à tous » (article L111-1 Code de la propriété intellectuelle), c’est sans oublier que l’œuvre en question doit satisfaire la condition d’originalité au sens juridique, à savoir porter « l’empreinte de la personnalité de son auteur ». Appimédia revendiquait l’originalité de son produit à travers sa structure, sa composition, son ergonomie, sans, hélas, parvenir à décrire le contenu et les contours de AppCash, de sorte que le tribunal ne se trouvait pas « en mesure de procéder à une quelconque comparaison entre les applications proposées par les parties ».
… mais qui retient le fondement de la concurrence déloyale
Appimédia a cependant eu gain de cause sur le terrain du droit de la concurrence qu’elle avait soulevé à titre principal et également à titre subsidiaire, le tribunal ayant considéré que Prizer avait créé la confusion dans l’esprit des internautes.
Pour les juges, non seulement Appimédia avait développé son application en juillet 2013, soit bien avant Prizer le 24 février 2014, mais ce dernier a également repris les caractéristiques essentielles initiées par la demanderesse (assurer la gratuité du jeu, le financement de la cagnotte, la même fréquence de loteries, une ergonomie proche), traduisant une volonté de ressembler à l’application AppCash, et caractérisant de facto un « comportement fautif contraire aux usages des affaires et générant un risque de confusion dans l’esprit de l’internaute, qui sera amené à associer les applications concurrentes ».
Ce risque est il assurable ?
Ainsi, même en l’absence de droit opposable comme le droit d’auteur, le concurrent n’est pas libre de reprendre à son compte et à l’identique un procédé existant afin de développer un produit ressemblant. Ces agissements constituent donc une faute engageant la responsabilité civile de son auteur, qui fait malheureusement l’objet d’une exclusion dans beaucoup de polices RC Pro.
Les polices de RC Pro conçues et gérées par Neotech Assurances et notamment celles du programme de Syntec Numérique Assurances (SNA) couvrent le risque de mise en cause pour atteinte à la propriété intellectuelle, industrielle (y inclus le risque le brevet) et les conséquences des agissements relevant de la concurrence déloyale ou du parasitisme économique.
Si vous avez un doute, n’hésitez pas à nous consulter
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Avec la participation de Marion Planès, Cabinet Nemezys